La Faculté des LLSH poursuit ses Journées pédagogiques, initiées en
2011-2012. La troisième Journée a eu lieu mardi 15 janvier 2013.
« Accroître la réussite en
licence », il n’est question que de cela dans les directions d’universités
comme au MESR depuis la rentrée, dans les déclarations des syndicats comme dans
celles de la CPU. L’injonction n’est pas nouvelle : en 2008 elle a inspiré un
« Plan » dont tous les bilans sont, pour ce qui concerne la réussite,
cruels. En même temps comment l’enseignement supérieur, qui depuis les années
70 a réussi sa massification, pourrait-il renoncer au défi de sa
démocratisation ?
Le 15 janvier nous avons
interrogé ce défi et examiné si et comment nous pouvons, en 2013, le relever.
La matinée a été consacrée à une grande
réunion-débat de toutes les équipes pédagogiques sur la réussite en licence à
la Faculté.
Isabelle
Laborde-Milaa, vice-doyenne responsable de la pédagogie, a brossé un panorama
de la réussite en licence, au niveau national mais surtout local :
chiffres et bilan critique des actions menées depuis trois ans dans la Faculté,
avec leurs enjeux et plusieurs perspectives d’action en la matière (Présentation Réussite en Licence). La
discussion qui a suivi a porté sur les moyens de rendre plus efficace l’action
de l’enseignant-référent, notamment : comment « capter » les
étudiants pour les rendez-vous ? Le besoin d’associer une cohésion entre
les dispositifs d’accompagnement a été souligné. Même chose pour les acteurs
qu’il s’agit d’associer : enseignants, bien sûr, mais aussi les
secrétariats, les tuteurs, les étudiants plus avancés. La L1 serait-elle
devenue une année de bac prolongée, se demande-t-on ?... Car le risque
inhérent à ces efforts est de nous disperser sur une réussite
multidirectionnelle dont nous n’avons peut-être pas les moyens : heurs et
malheurs du plan Réussite en Licence... Un
instrument, en tous cas, traverse tous les niveaux, de la L1 jusqu’au master,
et relie enseignants et étudiants : la copie ! Qu’en font ces
derniers ? Comment se saisissent-ils (ou non) de la correction ? Et
pour quel profit ? Voilà un sérieux problème pédagogique, qui interroge la
continuité des apprentissages et la responsabilité des étudiants dans leur
réussite.
Deux
interventions de collègues ont ensuite permis de faire un gros plan sur deux
enseignements transversaux qu’ils coordonnent et harmonisent en L1. Elisabeth
Le Corre, MCF de littérature française, est revenue sur 4 années de Méthodologie
du travail universitaire (MTU) pour en mesurer les difficultés et les effets positifs,
sachant qu’il s’agit de contenus qu’il n’est facile ni d’enseigner… ni de
maîtriser (pour les étudiants). (Synthèse MTU). Eric Pellet, PRAG de linguistique, a pour sa part présenté
un premier bilan sur le barème relatif à l’expression française qui a été
instauré en septembre 2011 dans la Faculté pour tous les travaux écrits. Ce
dispositif a maintenant trois semestres
de fonctionnement et méritait un retour, lequel a été effectué à partir
d’un questionnaire auquel ont bien voulu répondre une trentaine de collègues. (Synthèse expression française). Chaque bilan, sans occulter les points sombres,
incite à continuer dans ces deux voies, en exploitant les évaluations qu’en
font les étudiants et/ou les enseignants.
Enfin,
deux collègues d’autres composantes ont exposé, qui une expérimentation en
Sciences concernant des parcours destinés à des bacheliers technologiques
(Gérard Lauton, chargé de mission), qui un dispositif d’appel et de soutien à
des innovations pédagogiques (IDEA) ouvert à toutes les composantes
(Jean-Michel Mallard, chargé de mission et directeur-adjoint de l’IUFM).
L’après-midi un colloque a approfondi la question avec les interventions
de
trois spécialistes qui, sous des angles différents, ont pesé les plus ou moins
grandes chances de réussite pour les étudiants :
- "Difficultés, interruptions et réorientations : le continuum lycée-université en question", par Gérard Boudesseul, sociologue, maître de conférences HDR à l’université de Caen et membre du CÉREQ-ESO, et Nathalie Beaupère, chargée d'études au Centre Associé Régional (CAR) au CÉREQ de Bretagne. D’où il ressort que les « décrocheurs », dont les chercheurs ont analysé les discours, ne forment pas une catégorie homogène : autant de trajectoires que de représentations diverses de l’université et de soi, qui influent sur la réussite et peuvent faire obstacle. Aux enseignants de repérer, d’orienter si possible… et de manœuvrer entre continuité et rupture car, contrairement à une doxa dominante, un peu de rupture après le lycée ne nuit pas pour aider les étudiants à acquérir les normes de l’université.
- "Parcours diversifiés, parcours disciplinaires ou parcours in-disciplinés : quelle formation pour quelle réussite des étudiants ?", par Christophe Pébarthe, historien, maître de conférences HDR à l’université de Bordeaux 3 et membre d’Ausonius. Ce collègue, partant de Durkheim, s’est attaché à déconstruire des évidences un peu trop admises (pourquoi l’insertion professionnelle est-elle devenue le critère de qualité d’une formation ? l’Université peut-elle et doit-elle éponger tous les dysfonctionnements sociaux ?) et à pointer des impensés administratifs qui gouvernent nos modèles de formation. Mais alors que faire, que mettre en place ? Entre le trop de méthodologie et la pluridisciplinarité saupoudrée, des voies existent dans le partage des savoirs, la construction critique des disciplines… qu’il reste à incarner dans des pratiques pédagogiques concrètes.
Depuis
la 1ère Journée pédagogique, l’intérêt des collègues (enseignants, enseignants-chercheurs et doctorants) pour
la pédagogie ne se dément pas : en témoignent les débats animés, voire
virulents, souvent empreints d’humour et de drôlerie, où sont palpables
engagement et solidarité.
Que
tous soient remerciés, ainsi que les divers organisateurs qui ont contribué à
la « réussite » de cette troisième Journée pédagogique.
Isabelle Laborde-Milaa,
Vice-doyen à la pédagogie